Cohabitation piétons / VTT : quelques éléments de réflexion

La cohabitation entre les VTT et les piétons, c’est LA problématique qu’on retrouve dans presque toutes nos missions! La crainte est légitime : ces VTT qui vont envahir les chemins ne vont-ils pas faire fuir les piétons? Oui, non, peut être… ça dépend des cas ! Quelques éléments de réflexion, issus de notre expérience, de celle de confrères, et d’un article scientifique surprenant.

Quand on parle de VTT, c’est un peu comme quand on parle de ski : il faut préciser la pratique : la descente, le freestyle ou le Cross Country ne s’appréhendent pas de la même manière.

Parlons de VTT de descente tout d’abord.

A notre connaissance personne ne s’est penché sur cette question de manière écrite et méthodique, avec des résultats concrets. Dans ces cas là, il faut faire parler l’observation et l’expérience : Comment les vététistes de descente cohabitent ils avec les piétons? Réponse : mal!

Le vététiste de descente, pour que son expérience soit réussie, doit être sûr qu’il ne va pas tomber nez à nez avec un piéton au beau milieu de sa descente. C’est dangereux, et déplaisant. Le piéton se fait la même réflexion! Ne tombons cependant pas dans le cliché : cette observation est valable pour les excellents descendeurs comme pour les débutants : ces derniers vont moins vite, d’accord, mais ils seront bien plus dérangés par des piétons à éviter au dernier moment, et seront moins à l’aise avec les manœuvres « réflexes » nécessaires. L’expérience montre que les piétons ont autant à craindre des descendeurs rapides maîtrisant mieux leur monture que des débutants plus lents mais ne maîtrisant pas bien la leur… Quand on parle de VTT de descente, il faut donc une séparation claire des traces, c’est la seule solution pour une cohabitation sécuritaire et plaisante. C’est de cette constatation que la notion de piste de descente est née : un espace aménagé pour le VTT de descente, et réservé uniquement à cela.

MAIS… est-ce si facile? Non, on le voit bien en station : beaucoup de randonneurs ne sont pas capables de voir la différence entre un sentier piétons et une piste de VTT de descente. Ils s’y engagent donc… La réciproque est aussi vraie! Alors que fait-on? Pas de solution miracle : pédagogie aux caisses de forfaits, pédagogie aux remontées mécaniques, et signalétique!

  1. ‘ttention !!!! Oui, parfois ça passe de justesse…
  2. « Bonjour Messieurs dames! » la différence avec l’image d’à côté, c’est une bonne signalétique, au départ et sur les « points chauds ».

Mais…y-a-t-il des statistiques? Pas vraiment de statistique de collision, car le phénomène est rarissime. Mais combien de frayeurs ou de « presque collision »? Impossible à dire mais il y en a. Les plaintes déposées par les touristes peuvent être de bons indicateurs. A nous de faire en sorte qu’il y en ai le moins possible!

Et le Cross Country?

Là on change complètement de vision. Ce n’est même plus le même sport! En France, aucun doute, VTT et randonneurs cohabitent sur les sentiers pour une raison toute simple : il n’existe presque pas de sentiers de XC spécifiques : les VTT vont donc sur les sentiers piétons, larges ou étroits… Comment cela se passe-t-il quand ils se croisent ou se doublent? A notre connaissance, pas d’étude française à ce sujet… Il y a un certain nombre de références internationales cependant. En voici une originale : une équipe scientifique de l’Université de Vienne en Autriche est allée enquêter au bout du monde, en Nouvelle Zélande, sur le fameux sentier de Queen Charlotte en 2002. Ce sentier côtier est un classique des « must see » néozélandais, alliant paysage exceptionnel et richesse historique.

Départ intermédiaire du sentier Queen Charlotte track

Ayant eu la chance de rouler sur ce sentier en pleine saison touristique, on peut vous en parler ! Ce sentier est très long et se pratique en plusieurs jours, que ce soit à pied (4 à 6 jours en général) ou en VTT (2 à 3 jours pour la partie ouverte aux vélos). C’est un sentier large d’un mètre environ, avec des dénivelés cumulés conséquents.

On distingue la Queen Charlotte track, serpentant sur les crêtes…

Sur quoi a travaillé notre équipe autrichienne? Ils ont fait une synthèse intéressante d’études concernant le VTT en l’environnement, mais aussi de travaux concernant la perception des randonneurs sur la sécurité et le VTT. Pour les curieux, voici le manuscrit complet => Etude complète

Quelles sont leurs conclusions ? Ils constatent que, pour les piétons, il semble que le fait de croiser des VTT soit un facteur positif de satisfaction ! Cela n’est sans doute pas généralisable mais voilà une information importante : si on crée les conditions de la sécurité, la cohabitation piétons/VTT ne devient alors plus un problème, mais un avantage ! La Queen Charlotte track ne permet quasiment jamais aux VTT d’aller vite, même en descente : les conditions de sécurité sont naturellement présentes même si le sentier n’a pas été tracé pour les VTT. Cette question de « cohabitation positive », on la retrouve ailleurs en Nouvelle Zélande et en Amérique, ou les sentiers spécifiques de Cross Country sont très développés : La plupart des territoires préfèrent ouvrir aussi ces sentiers à la multi-activité, en en faisant des outils pour apprendre la cohabitation, justement…

Mais alors, cette cohabitation piétons VTT?

Tantôt clairement dangereuse, tantôt pas dangereuse mais déplaisante, tantôt bénéfique… Et puis, on a parlé de descente et de Cross Country, mais pour l’enduro, les bike parks… ça marche comment ?  Eh bien, on s’en doute, il n’y a pas de formule magique… Ces dernières phrases pourraient d’ailleurs tout aussi bien convenir à une autre problématique bien connue chez nous : le foncier!

Ce billet n’avait pas vocation a résoudre un problème insoluble par une formulation générale, mais d’essayer de démontrer que la problématique de la cohabitation randonnée / VTT est difficilement généralisable, et que chaque solution soit se trouver localement, par les aménagements et une communication adéquats.